L'impact économique du Futuroscope

1. l’Etat au sens large pratique très rarement des exercices d’évaluation. Le fait qu’une collectivité se lance dans un tel exercice est donc une bonne chose, il serait bon que ce type d’exercice se généralise,
2. dans l’étude, le cabinet tente d’évaluer les effets en chaîne de l’investissement public, ce qui me semble également une bonne chose : on sort ainsi de l’idée que les impôts ne servent qu’à embêter les gens, ils sont dépensés, ces dépenses génèrent des richesses, ces richesses sont distribuées sous forme de revenus, ces revenus sont pour partie dépensés localement, etc… Méthodologiquement, il s’agit de s’appuyer sur une analyse renouvelée genre « théorie de la base » dont j’avais donné les grandes lignes dans ce document,
Ceci dit, les exercices d’évaluation sont difficiles, et il y a quelques problèmes avec celle réalisée par le Conseil Général :
1. La première limite : le Conseil Général s’est lancé dans l’exercice d’évaluation en faisant appel à un consultant qui travaillait auparavant pour … le Conseil Général. Pour l’avoir rencontré et discuté à plusieurs reprises avec lui, je ne doute pas qu’il a tenté de faire un travail impartial. Cependant, il est clair que le Conseil Général prête le flanc à la critique en confiant l’étude à quelqu’un qui n’est pas totalement extérieur à l’institution. A l’avenir, il faudrait que les collectivités fassent appel à des experts totalement extérieurs, même si, en faisant cela, on prend le risque d’une évaluation moins favorable.
2. La deuxième limite porte sur la méthodologie employée. L’étude se décompose en 3 parties : i) étude du Chiffre d’Affaires du parc et des autres activités de la zone, ii) étude des revenus générés dans la zone, iii) impact en termes de création d’emplois. La première partie n’est pas satisfaisante d’un point de vue économique, car le chiffre d’affaires mesure simplement les recettes générées par une entité, sans comptabiliser les coûts. Si on en reste à ce type d’analyse, on en vient à l’idée que le meilleur investissement est un gros investissement (big is beautiful) alors qu’il me semble qu’un bon investissement est un investissement qui rapporte plus que ce qu’il coûte… La deuxième et la troisième partie sont plus satisfaisantes. Elles sont conformes aux exercices d’évaluation faits par les économistes. Elles montrent notamment qu’environ 2 milliards d’euros de revenus ont été générés, pour un investissement initial de 500 millions d’euros, soit un taux de rentabilité de 8% par an, ce qui n’est déjà pas si mal… disons que si le Conseil Général avait placé cet argent auprès d’intermédiaires financiers, il n’aurait pas fait mieux.
3. troisième limite : il y a cependant un problème, qui tient à la nécessité de distinguer entre le Parc de loisir et la zone d’activité. Si le Parc a eu des effets indéniables en termes d’image, il est devenu au fur et à mesure des années un vrai « boulet ». Pourquoi ? Car il fait supporter au département des coûts fixes très importants. Or, si la fréquentation permet de couvrir les coûts variables, elle ne permet que rarement de couvrir
Pour finir, je prêche pour ma "paroisse" : on insiste beaucoup en ce moment sur la nécessité de renforcer les relations entre entreprises et Université pour favoriser l'innovation. Dans la tête des politiques, cependant, il s'agit plutôt de faire appel, côté université, aux laboratoires de sciences "dures" (ou "inhumaines"), rarement aux laboratoires de sciences "molles" (ou "humaines"). Il me semble pourtant que des collaborations efficaces pourraient être nouées entre les collectivités et les laboratoires d'économie, de géographie, de sociologie, etc..., par exemple sur cette thématique de l'évaluation des politiques publiques. Cela devrait permettre aux collectivités d'être, elles-aussi, plus innovantes...