TVA sociale : une histoire belge?

Publié le par Olivier Bouba-Olga

belgique.jpgInquiets pour la sécurité routière en Belgique, le gouvernement a demandé à un groupe d’éminents experts d’étudier les systèmes en vigueur dans quelques pays d’Europe, afin d’identifier puis d’imiter les meilleures pratiques. Après quelques mois d’études approfondies (avec une foultitude de tests statistiques et économétriques), les experts parviennent aux conclusions suivantes : les routes anglaises sont parmi les plus sûres, ce qui s’explique par le fait que les automobilistes roulent à gauche.

Séduit par ces conclusions, le gouvernement belge décide d’adopter la mesure. Mais, bien conscients des incertitudes qui pèsent sur certains points de l’étude, ils décident de commencer par une expérimentation, avec généralisation au bout d’un an, si le système s’avère efficace : ainsi, de juillet à décembre, seuls les camions seront autorisés à rouler à gauche[1]...


Le parallèle est-il possible avec la TVA sociale ? Pas impossible…


Le gouvernement explique en effet que la TVA sociale a été adoptée par l’Allemagne et le Danemark, que ces pays ont des bonnes performances économiques en matière de croissance (performances à relativiser, soit dit en passant) et de lutte contre le chômage, l’adopter à notre tour semble donc pertinent (c’est le discours tenu par Jean-François Copé dans une interview pour France 3 il y a deux ou trois jours). En oubliant de s’interroger plus avant sur les déterminants des performances de ces pays , et sur le rôle effectif qu’a pu y jouer la TVA sociale.

Sur le volet expérimentation, également, les propositions que j’ai pu voir laissent un peu rêveur : certains nous disent que l’agriculture pourrait être le secteur test pour la TVA sociale (la FNSEA est demandeuse), rebaptisée, je vous le rappelle, TVA anti-délocalisations par notre premier ministre. Si le dispositif fonctionne, on ne verra donc plus passer le "train des délocalisations" (ce sont les termes de notre président) de vaches charolaises ou de champs de maïs qui, c’est bien connu, traversent quotidiennement les voies ferrées françaises pour s'expatrier en Chine…

Si le secteur retenu est le secteur automobile (hypothèse entendue à plusieurs reprises, évoquée ici par exemple), on peut également s’interroger mais pour d’autres raisons. Ce secteur est en effet marqué par un recours important à la sous-traitance. Dès lors, le dispositif concernera-t-il uniquement les donneurs d’ordre, ou bien sera-t-il étendu aux sous-traitants ? Dans le premier cas, se pose un problème évident : si deux constructeurs ont un degré d’internalisation différent, le constructeur qui sous-traite le moins sera clairement avantagé par la mesure. Altération peu défendable de la concurrence. Dans le deuxième cas, idem : si le dispositif concerne les sous-traitants, quid de la concurrence entre les sous-traitants qui sont fournisseurs de l’automobile et d’un autre secteur, mettons l’aéronautique, et d’autres sous-traitants qui ne sont eux fournisseurs que de l’aéronautique, et qui seraient en concurrence avec les précédents ? Les premiers bénéficieront d’un allègement de charge, pas les derniers. Si on décide alors d'étendre le dispositif à ces derniers, on risque de devoir le généraliser, de proche en proche, à l'ensemble des entreprises. Bref, l’expérimentation peut être une bonne chose dans certains cas, mais dans ce cas précis, je m'interroge...

PS : petite précision à destination de notre nouveau ministre gaffeur d'Etat : je n'ai pas dit que, pour réduire le chômage, il fallait autoriser les camions à rouler à gauche sur les routes françaises...


[1] merci à Philippe N. pour la version initiale de l'histoire belge.

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Publié dans Politique

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G
Mon cher Olivier,1° C'est Albert Einstein qui parle des profs, pas moi, je crois l'avoir écrit, vous ne l'aviez pas lu ?2° Quand je suis pris les doigts dans le pot de confiture (comme Karg), j'ai l'habitude de faire mon mea culpa, ce qui ne me coûte rien puisque comme vous l'avez forcément expérimenté vous même c'est de l'erreur que naît tout progrès.3° Si je vous en crois, vous donniez l'exemple des vaches qui regardent le train des délocalisations passer... tout en sachant que l'exemple était nul et non avenu ?4° Vous avez l'air de vous étonner de l'antagonisme du monde du travail à vos amusantes hypothèses, y compris de la part des patrons "solidaires" et socialisants... vous pensez mieux connaître l'économie réelle que ses propres acteurs.... comme ces critiques de cinéma qui jugent les metteurs en scène ?
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O
1/ si, si, j'avais lu2/ vous progressez souvent donc :-)3/ la TVA sociale a été rebaptisée anti-déloc, certains suggèrent de l'appliquer à l'agriculture, j'en déduis qu'il y a beaucoup de déloc dans l'agriculture... j'ai donc cherché un exemple amusant4/ où avez-vous vu "l'antagonisme du monde du travail à mes hypothèses?". Je suis preneur... sur la fin, comme déjà dit dans un post : pensez-vous que Pétain soit le mieux placé pour parler du régime de Vichy?
G
Au fait....  faut-il aussi que je  "post"  aux disciples du Maître une facture d'Auchan pour leur prouver ce que tout les "gens qui font" savent depuis toujours ?Ou bien les disciples auront t'il l'honnêteté intellectuelle de le faire tout seul ?
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O
Bon, ben vous, vous avez dû être traumatisé à l'école pour dire des choses pareilles sur les enseignants...J'ai du mal à voir en quoi ce que je dis dans mon billet sur l'agriculture est le signe de mon incompétence, puisque je ne fais que signaler que certains préconisent de prendre comme secteur test l'agriculture, ce qui me semble cocasse. Sinon, si vous allez chez Auchan, n'hésitez pas à me poster une bière, plutôt qu'un ticket de caisse...
G
Mr Sorbet, vous fondez, votre argumentaire se liquifie:d'un part les produits taxé à 5,5 seront aussi concerné par la TVA social, d'autre part les produits issu de l'industrie agrolimentaire sont taxé à 19,6% comme tous bien manufacturé, seul les produits agricoles au sens stricte sont à 5,5% (genre un sac de patate, mais pas un boite de purée).1° Jamais le gouvernement n'a parlé de passer la TVA à 5,5%  à 1O,5 %.2° J'ai passé ma vie, à gérer des sociétés, et en particulier à acheter des produits agricoles manufacturés qui, à l'exception des acools sont tous à 5,5%. " Quand on sait on fait , quand on ne sait pas, on enseigne (Einstein)."Vous visiblement, Karg, vous enseignez !
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D
Bonjour Olivier Bouba-Olga,Quelques commentaires sur l’expérimentation envisagée de la TVA sociale, avant éventuelle généralisation. Dans un récent billet (Vendredi 29 Juin 2007, TVA sociale, première synthèse) j’ai rappelé que Jean-Pierre Raffarin s’est prononcé sur certaines modalités possibles de l’expérimentation. L’expérimentation pourrait porter, dit-il, sur les importations de textile ou d'automobile.Une phase expérimentale est plutôt une bonne idée, non ? La France ne souffre-t-elle pas d’un déficit d’expérimentation préalable ?Il reste bien entendu à définir  à partir d’une étude plus approfondie les modalités de mise en œuvre de la TVA sociale et de la phase d’expérimentation.Mais pour l’instant, rien n’est certain car les modalités précises de la mesure ne sont pas connues. Il est donc bien difficile de tirer des conclusions solides sur ces effets potentiels, positifs ou négatifs, pour les ménages, les entreprises, la compétitivité, les finances publiques, le financement de la protection sociale… Comment chiffrer précisément les effets divers de la TVA sociale sans avoir toutes les données nécessaires aux calculs ? Tout au plus pouvons-nous tenter de synthétiser les effets estimés selon les différents scénarios et les divers impacts envisagés. Voir sur le blog Démocratie Economie et Société 4 billets sur la TVA sociale. http://democratieetavenir.over-blog.com/Bien cordialement,David Mourey
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M
On pourrait pas, une fois, fiche la paix aux belges? C'est pas plutôt une histoire franco-française-cocorico-on est les meilleurs?
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