Le retour d'Alain Lambert...

Publié le par Olivier Bouba-Olga

J'avais commenté il y a quelques temps certains propos d'Alain Lambert (ancien ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire). Je récidive.

Citation (source ici) :

De même, rappelons que les transferts ou les dépenses publiques ne créent aucune richesse supplémentaire ! Leur effet est souvent plus faible qu'on ne le croit puisqu'ils se financent par prélèvements sur les plus productifs, dont les prix de revient augmentent d'autant. Avec tous les risques de délocalisation d'emplois qui en résultent.

Premier point :  "les dépenses publiques ne créent aucune richesse supplémentaire". Je rappelle à Alain Lambert qu'il y a globalement consensus chez les économistes pour dire que la source essentielle de croissance d'un pays comme la France est l'innovation. Que pour une part importante, l'innovation se nourrit des dépenses de R&D, d'une part, et de main d'oeuvre (très) qualifiée (capital humain), d'autre part. Les dépenses publiques affectées  à l'éducation et à la R&D sont donc sans doute parmi les dépenses qui créent le plus de richesses... (on peut multiplier les exemples).

Deuxième point : "Leur effet est souvent plus faible qu'on ne le croit puisqu'ils se financent par prélèvements sur les plus productifs, dont les prix de revient augmentent d'autant." Ben voyons! La compétitivité des entreprises françaises s'explique pour une bonne part par l'environnement qu'elles trouvent dans notre pays, environnement qui doit beaucoup à la puissance publique (qualification de la main d'oeuvre, laboratoires de recherche, infrastructures de communication, de transport, cadre de vie des populations, etc.).  Dire que "les dépenses publiques conduisent à accroître d'autant le prix de revient des entreprises" est donc bêtement faux, il peut au contraire le faire diminuer si les dépenses permettent à ces entreprises de bénéficier de ce que les économistes appellent des externalités positives (on bénéficie de ressources sans en avoir payé totalement le prix).

Troisième point (anecdotique comparativement au deux premiers, qui méritent de figurer dans une anthologie) : Avec tous les risques de délocalisation d'emplois qui en résultent. La thèse d'Alain Lambert semble donc la suivante : les entreprises fuient une fiscalité trop lourde (on prélève les plus productifs). Faudra qu'il nous explique ce que viennent faire dans l'hexagone toutes ces entreprises étrangères, puisque la France occupe toujours les premières places dans les flux d'IDE entrants . Et que des études récentes tendent plutôt à montrer que la compétitivité coût de la France est bonne (j'en avais parlé ici).

Qu'Alain Lambert veuille réduire les dépenses publiques, c'est une chose, et cela peut faire débat. Mais qu'il en vienne à énoncer de telles absurdités, les bras m'en tombent... non pas que quelqu'un puisse dire de telles choses... mais que ce quelqu'un ait pu être ministre délégué au budget...

Publié dans Politique

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S
L'Etat représente pour certaines entreprises une vache à lait pour le secteur privé... Dassault et consorts...Mais aussi, tous les contrats passés par tel ou tel service administratif...
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O
@ "un libéral en marche" : si vous lisez les commentaires plus haut , vous verrez que j'ai déjà répondu à cela : je n'attaque pas le libéralisme de Lambert, mais l'inexactitude de son propos (celui que j'ai cité dans le billet). Après, qu'il soit un adepte de la réduction de la dépense publique, c'est autre chose, ce n'est pas une raison pour raconter des inepties économiques. Je reviendrai bientôt sur la question du financement public/privé de la recherche, ca permettra de débattre sur des bases plus saines que celles qui consiste à croire que je suis un méchant anti-libéral économiste universitaire etsurtout, mon dieu, fonctionnaire.
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U
" Personne ne nie la corrélation dépense publique / PIB. Sauf que la corrélation ne fait pas la causalité,"Et que par ailleurs, il est évident que plus on donnera d'argent à qui que ce soit, plus il avancera vite. Et cette règle est vraie pour les lièvres comme pour les hippopotames.Mais la bonne question à se poser n'est pas celle-là : la question qu'on se pose est de savoir à qui donner une quantité d'argent préalablement définie pour en obtenir le meilleur retour possible. C'est la question que pose le tandem Migaud/Lambert. Et si, effectivement, nos meilleurs économistes universitaires fonctionnaires ne comprennent pas cela, c'est à désespérer. Alors, soyons optimistes : imaginons qu'il s'agit simplement d'un parti-pris, et retenons cette leçon mutatis mutandis.Cherchez donc quelques informations sur "la parabole des talents."
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G
Bah ,si vous étiez de bonne foi vous corrigeriez votre article, vu votre absence de réponse sur les points que je soulève. Vous ne l'êtes pas, tant pis pour le bien public. Personne ne nie la corrélation dépense publique / PIB. Sauf que la corrélation ne fait pas la causalité, et surtout ne dit rien sur le sens de cette éventuelle causalité. Ce n'est pas à la table du pauvre que prospèrent les parasites ! Vous ne connaissez pas de pays dont la richesse soit due seulement aux initiatives privées ? Ca en dit long sur votre perception des choses. Tous les états et pouvoir du monde étouffe tout (comme la Chine impériale ou le Japon avant l'ére Meiji), et quand, sous la contrainte et parce qu'il devient bien évident qu'ils sont en train de se faire dépasser, ils finissent par lever le couvercle (pas trop, hein ?), il faut leur attribuer le mérite de ce qui suit ? Quelle blague !  Tous les états du monde financent des industries et des recherches militaires (dont nucléaires), certaines ont des applications civiles : faut leur dire merci ? Quelle autre blague ! La richesse du monde moderne, elle tient en quelques noms (dans le désordre et en oubliant d'aussi importants) : Watt, Edisson, Tesla, Marconi, quelques cimentiers et siderurgistes, Diesel, Daimler, Pasteur, Jenner, Charcot, Bell, Wright, Ford, les frères Lumières, Louis Braille, etc. Complétez vous-même. Elle est où, l'intervention positive de l'état ? Le Pouvoir est intervenu, ça oui ; dans le meilleur des cas il a "volé au secours de la victoire", et toujours réclamé sa part, forcément. Mais sortit de là, c'est surtout des ennuis que le Pouvoir a apporté à ces gens ... Sélection naturelle ? savez-vous de quoi vous parlez ? Qui sélectionne quoi, sur quel critère ? Les vaches broutent les champs, elles y laissent leurs bouses. Génial pour les bousiers, à première vue dommage pour l'herbe ... sauf que sans les vaches il n'y aurait plus d'herbe, ce sont des arbres qui s'installeraient. Etc. rien de plus compliqué à comprendre que la notion de "sélection naturelle". De fait, il y a des états dans l'écosystème économique. Rien ne permet d'affirmer que c'est une abération (c'est à dire que les états seraient de purs parasites superflus dans le système), ni que sans efficacité économique le pays / l'état sont condamnés ; Cuba ou la Corée du Nord ont l'air de parfaitement survivre, et leur population n'a pas l'air de baisser, tout compte fait. Sauf que français, je préfèrerais quand même ne pas attendre l'écroulement du pays comme celui de l'Argentine ou de l'URSS, ou de quantités d'état prétendument sociaux. Mais je ne doute pas que je survivrais aussi bien qu'un autre à une banquero
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V
@gem: "tous deux avec des prélèvements publiques parmis les plus faible de l\\\\\\\\\\\\\\\'OCDE"<br /> De l\\\'OCDE, peut-être, mais si on compare aux pays pauvres... Donc cet argument ne démontre à mon avis que les prélèvements publics peuvent être utilisés plus ou moins efficacement. Au contraire, je crois me souvenir qu\\\'on constate une corrélation importante entre prélèvements et dépenses publics d\\\'une part et PIB par habitant de l\\\'autre.<br /> Il n\\\'y a pas d\\\'exemple de pays riche, à ma connaissance, où l\\\'initiative privée seule ait fait de ce pays ce qu\\\'il est. Est-ce par amour naturel des humains pour l\\\'administration et le gaspillage ou plutôt parce qu\\\'un état solide est utile pour créer des richesses? La sélection naturelle économique ne voudrait-elle pas que ceux qui gaspillent et sont moins rationnels disparaissent? Pourquoi donc alors les pays où les états sont inexistants (si vous ne voulez pas payer d\\\'impôts, allez en Afrique par ex.) ne sont-ils pas riches et puissants?
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